Arrivé en 4° année (D2 pour les intimes) on commence un nouveau stage de 3 mois, d'octobre à fin décembre. Pour moi qui était avant avant dernier à choisir (cf ici) je me suis retrouvé pile là où je ne voulais pas aller : en pédiatrie (relisez avec en tête la musique d'un film qui fait peur, genre "Psychose" ou quand on perd dans "Plant vs Zombies").
Je ne veux pas y aller. La voix sur mon épaule gauche (en collants moulants rouges avec un trident) me dit : t'aimes pas les enfants, encore moins les enfants malades et en plus, la pédiatrie, c'est pas au programme de D2, c'est seulement l'année prochaine. A quoi ça te sert d'apprendre des trucs qui ne tombent même pas aux examens ?
Et sur mon épaule gauche, l'autre voix (en toge blanche avec une lyre) me dit : c'est beau les enfants, en plus tu leur rendra servie en les soignants. Et puis c'est bien la pédiatrie, il y a des nounours partout.
Évidemment, si on me chope un jour en train de jouer avec les nounours, à 22 ans, je fais un stage gratuit en psychiatrie.
Je prends mon courage et mon sthéto à 2 mains et je passe la porte. A mon grand étonnement, les enfants ne sont pas en train de brailler, le service est calme. Normal : il n'y a personne. Une puéricultrice avec une rose sur son badge (hihihi, ça me fera toujours marrer, cf ici) me dit qu'ils sont tous en salle de staff. J'arrive donc en retard, comme si ça ne suffisait pas avec ma barbe et mes cheveux longs.
On m'explique en quoi va consister le boulot, comment on s'organise, tout ça. "On", c'est Pr Brigitte, notre chef suprême qui demande qu'on la tutoie et qu'on l'appelle par son prénom (c'est suffisamment rare pour que je le souligne). Elle nous fait faire le tour du service, d'abord des locaux, puis des patients. Elle nous présente ses patients presque comme s'ils étaient ses propres enfants, en les appelant par leurs prénoms.
On rentre dans la chambre de "la petite Lilou, qui pèse 1,2 kg et qui a doublé son poids depuis sa naissance"...je fais des maths vite fait, je n'ai pas fini qu'elle répond à ma question : "Oui, elle pesait 600g à la naissance, elle est en forme, elle n'a aucune séquelle de sa grande prématurité."
Chambre suivante : on rentre à 15 chez une patiente de 8 ans qui vient d'être opérée d'une tumeur hypophysaire (un craniopharyngiome pour ceux que ça intéresse). La petite s'enfonce dans son lit et dissimule la moitié de son visage derrière sa couverture. On ne voit plus que ses yeux et sa cicatrice. "Oulah ! ça fait beaucoup de monde tout d'un coup." L'enfant opine.
"Bon, allez, parce que c'est toi et que tu es ma patiente préférée, tu as le droit d'en virer 2 de ta chambre."
La petite est intéressée, elle sourit et plisse les yeux en scrutant l'assemblée. Elle pose son regard sur tout le monde et montre 2 étudiants du doigt : "George et Simon, dehors !". Un autre externe qui a eu une panne de rasoir ce matin m'a accompagné dehors.
Les enfants n'aiment pas les barbus.
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