samedi 10 mars 2012

Année sabbatique 4

C'est évidemment la suite de thèse 9, mais comme je ne parle pas du tout de ma thèse dans ce billet, je suis obligé de le renommer.

Nous posons donc nos affaires dans le bungalow, chacun d'un côté, puis nous commençons la visite de notre petite île tropicale. Par "nous", j'entends Élodie et ses 2 amis, parce que bon, pas cons les mecs, il y a un gars qui rapplique avec une voiture, ils vont pas le virer non plus.

Plongée, palmes-masque-tuba (PMT pour les intimes) au milieu de coraux fantastiques, de poissons colorés (les mêmes que dans Némo) au milieu d'une eau turquoise à travers laquelle on voit le fond...paradisiaque.
Puis repas au bord de la plage, langouste, fruits exotiques, riz...Allez, les amis, c'est ma tournée (repas pour quatre à 12 euros, trop sympa le mec).

Puis plage, plage et re-plage. Au terme d'une journée épuisante, riche en couleurs (le rouge surtout, j'avais pris un coup de soleil dans le dos) nous sommes retournés, elle et moi, dans notre bungalow. C'est là qu'a commencé la danse : chacun fait un pas en avant, teste l'autre, examine sa réaction, puis se retire, à l'autre d'avancer d'un pas, petite pirouette et retour à la case départ.

Chacun se déshabille à tour de rôle dans la salle de bain, en prenant bien soin d'en ressortir vêtu d'un pyjama sommaire, même s'il fait une chaleur torride (tant au sens propre qu'au figuré). Le but étant de couvrir un maximum de peau sans passer la nuit à transpirer, mais ne pas trop en cacher non plus histoire de donner quelques aperçus à l'autre de certaines parties de nos anatomies dont nous sommes les plus fiers.
Malheureusement, ayant fait ma valise 2 jours avant de rencontrer Élodie, ce genre de choses ne s'anticipe pas. J'optais donc pour un petit short qui mettait bien en valeur mes charmantes petites fesses, et le plus petit Tshirt dont je disposais.
Elle se vêtit d'un tanga scandaleusement moulant et d'un simple châle pour le haut, opaque dans la demi-pénombre mais à moitié transparent au moindre rayon de lumière. Mon sang bouillait (malgré les ventilateurs) : tout ce qui venait par paires chez elle était parfaitement bien proportionné et s'accordait divinement bien avec l'ensemble. Mon Dieu qu'elle était belle.

Dans ma tête, c'était la guerre : je me lance tout de suite, mais si elle me rejette, demain, ça va être la grosse merdasse pleine d'ambigüité. Mais si je n'y vais pas, elle va penser que je ne m'intéresse pas à elle, alors que ce n'est pas vrai...Je fais quoi ?!?!
Pendant ce temps, elle se glisse sous les draps, côté gauche du lit, à raz bord. Je m’immisce timidement de mon côté, le droit, également à mon extrémité respective. Je me rapproche ? un peu ou carrément droit sur elle ? je commence à esquisser un mouvement d'approche et...

Elle sort son livre :
"_ J'aime bien lire avant de m'endormir.
_ Moi aussi.
C'est la vérité.
_ Zut, il n'y a qu'une seule lampe et elle est de ton côté."

Elle s'est collée à moi, en cuillère, la tête contre mon épaule, la lampe dans mon dos pour pouvoir lire ses quelques chapitres. Je faisais semblant de tourner les pages. Comme je vous disais, sous la lumière, son châle m'offrait des courbes autrement plus élégantes et instructives à regarder que celles des mots dessinés sur du papier. Mais pourquoi suis-je aussi timide que quand j'avais 14 ans ? C'est pas possible ! Lance-toi Georges !

Juste à ce moment là, elle se tourne vers moi, tends son bras vers mon épaule droite comme pour m'enlacer et m'embrasser mais, au lieu de cela, elle coupe le contact de la lampe et me lance :
"Bonne nuit" avec un petit sourire mi-endormi, mi-timide.

Bon, ben, la littérature aura décidé pour moi du sort de la nuit. Note pour demain matin : rembobiner le marque-page et le remettre au bon chapitre.

Mes sens se réveillent un part un. D'abord l'ouïe avec les oiseaux qui chantent dès la première lueur. Puis l'odorat, le petit déjeuner et ses croissants sont prêts. Vint la vue : je me suis retrouvé au milieu du lit. Le toucher : il y a comme un poids sur ma poitrine. Je baisse la tête : Élodie est endormie, la tête sur moi, un bras en travers de mon ventre, une jambe sur la mienne. Le dernier sens à s'éveiller : le goût : mais qu'est-ce que j'ai bien pu manger hier soir pour avoir comme du chacal séché au fond de la gorge ?

Elle ouvre un œil, puis l'autre, se rend compte de la situation et se contorsionne pour se reporter de son côté du lit en prenant bien soin de rabattre son châle sur elle. Elle était écarlate, et oui ! c'est possible même sur une peau mate comme la sienne. Toute gênée, j'ai tenté de la rassurer comme j'ai pu (en me débrouillant pour ne pas lui souffler mon haleine matinale fétide) :
"_ Il ne s'est rien passé, on s'est juste réveillé dans les bras l'un de l'autre. C'est tout.
_ S'il te plait, n'en parle pas aux autres, d'accord ?
_ D'accord."

Le reste de la journée s'est passé normalement, visite de réserves de protection de la faune, les singes, les perroquets, les serpents...plage encore et toujours. Le soir, concert de musique locale jusqu'au milieu de la nuit.

De retour au bungalow, même manège que la veille, chacun se place de son côté du lit. Mais cette fois-ci...il est 5h du matin, je suis bien naze et je reprends l'avion demain matin pour recommencer le boulot le surlendemain. Je fais quoi ? je prends le risque de ne pas dormir et de bosser le reste de la semaine avec les cernes de Jacques Higelin ?
Et puis, en début d'année, j'avais émis le souhait de rencontrer la femme de ma vie pendant mon année sabbatique. Il y a en a une exceptionnelle à moins d'un mètre de moi. Si ça se trouve...Mais je viens de rompre avec une autre femme d'exception...enfin, techniquement, nous ne sommes pas séparés, nous avons pris un peu de distance pour réfléchir.
Mouais, en général, les périodes de réflexion...la réponse est connue avant de poser la question (je fais volontairement preuve de mauvais fois pour bien montrer qu'en ces moments, nul n'est vraiment objectif). Mais je fais quoi avec celle qu'il y a à côté de moi ? Si c'est bien la femme de plusieurs années, est-ce bien judicieux de commencer notre relation sur une tromperie ? comment pourrai-je être certain qu'elle ne recommencera pas quand elle se sera lassée de moi ? Je ne vais pas non plus prendre mon téléphone tout de suite, écrire à Murielle par texto que c'est fini pour pouvoir batifoler l'esprit tranquille ! ça serait plus que moche, ça serait...

Pour mettre un terme à toutes ce tergiversations, je me tourne vers elle. Je verrai bien comment ça se passe et j'aviserai ensuite. Je lui caresse lentement le bras, je descend doucement, je passe précautionneusement la main droite sur sa rotondité puis vers sa cuisse droite. Je m'avance pour lui administrer un baiser dans le cou et j'entends sa respiration. La mienne était saccadée, rapide. La sienne lente, profonde, apaisée. Elle dormait.

C'est une énorme qualité des travailleurs médicaux : nous avons la faculté, fatigués, de garde ou de lendemain de garde, de pouvoir nous endormir rapidement n'importe où. C'est pratique pour récupérer, ça l'est moins dans certaines circonstances, comme ce soir par exemple.

Je m'en retournais, dépité, à mon extrémité du lit. A force de réfléchir, le moment était passé.

Le lendemain matin, nous nous sommes réveillés dans la même position, dans les bras l'un de l'autre. Elle a ouvert un œil puis l'autre, a sondé mon regard. Je lui ai dis :
"_ Ce matin, je te garde dans mes bras.
_ D'accord."

Elle a souri, je me penche vers elle (en priant qu'elle soit indulgente des haleines matinales) et l'embrasse. Elle me retourne ce baiser, m'empoigne le cou et me presse vers elle mais juste après, elle s'éloigne et retourne de son côté en regardant le plafond.
Je me penche vers elle, embrasse la base de son cou, son sternum, son nombril et je me dirige vers l'origine du monde pour savoir si la marée monte...je sens sa respiration se saccader, comme lors d'un accouchement, elle plonge ses deux mains dans mes cheveux, serre fort et me dit :
"_ Je préfère ... pff pfff...que tu t'arrêtes là parce que ... pff pfff pfff...si tu commences, ... pfff pfff il va valoir que tu finisses et ... et ... pfff... et ce n'est pas une bonne idée.
_ Ah bon ?
_ Non. J'ai un copain.
J'ai essayé de cacher mon regard désappointé autant que possible, sans succès.
_ Tu es déçu ?
_ Oui, un peu (oh le bel euphémisme).
_ Je suis désolé de ne pas t'en avoir parlé plus tôt mais...je ne sais pas...je suis un peu perdue en ce moment.
_ C'est à dire ?
_ Ça va pas fort entre lui et moi. Les 2 mecs qui dorment dans le bungalow d'à côté sont ses potes, je retourne en métropole dans 2 jours...tout ça...c'est le tourbillon dans ma vie en ce moment et tu arrives pile à ce moment là. Tu me perturbes encore plus !
_ Mince, désolé de l'apprendre (zut, un peu trop d'ironie dans la voix). 
_ Par contre, j'ai le sentiment que...je ne sais pas...j'ai envie de te revoir. Mais j'ai pas envie de commencer comme ça.
_ Ça me va. T'as raison, c'est peut-être mieux d'attendre que les choses soient plus claire dans nos vies."

Je sais, c'est nul cet argument, mais à l'époque je ne le savais pas. Nous avons passé le reste de la matinée à glander dans le lit, dans les bras l'un de l'autre, en attendant la dernière minute pour que je parte prendre mon avion. Nous nous sommes re-raconté nos vies (la version longue cette fois-ci), histoire de se connaître davantage avant de nous revoir.
Elle a copain, ok, mais elle compte le quitter (mais bien sûr ! la marmotte tout ça...). Dans 1 mois, elle sera en métropole (moi aussi) et on pourra se revoir à ce moment là, au calme. Pourquoi pas ?

Mais tout ça, malgré tous nos efforts respectifs pour planifier nos situations, va se compliquer légèrement. Rien ne se passe jamais comme prévu. J'en parlerai la prochaine fois...

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